La cardamome verte

Aujourd’hui, place à la cardamome et j’en suis très heureuse car c’est une épice que j’affectionne tout particulièrement, tant pour la délicatesse de son parfum, de ses saveurs, que pour ses vertus médicinales. Elle est en effet employée depuis des millénaires en Ayurvéda pour soigner les troubles digestifs, respiratoires, ainsi que les calculs rénaux (elle était également employée en Chine à cette fin), et bien plus encore…

 

Tout d’abord, un peu d’histoire…

Les Égyptiens vantaient déjà les vertus médicinales de la cardamome dans le papyrus Ebers*. Il y a de cela 25 siècles, elle était déjà l’objet d’importations pour entrer entre autres dans la composition de cires parfumées.

Elle était également consommée au 4e siècle avant Jésus Christ en Grèce. Hippocrate l’évoque dans ses écrits pour le traitement de certaines complications, notamment lors des accouchements. Moins d’un siècle plus tard, l’épice était importée en quantité massive dans toute la région méditerranéenne du fait des échanges commerciaux découlant des conquêtes d’Alexandre le Grand. Elle était davantage reconnue à Rome pour ses vertus digestives et éveiller les désirs charnels, pendant qu’Ovide célébrait son parfum unique dans ses poèmes. Cléopâtre, quant à elle, accueillait son amant Marc Antoine dans son palais égyptien parfumé à la cardamome.

La cardamome arrive en Europe occidentale et dans les pays scandinaves vers le 15e siècle. En tant qu’antiseptique elle servait à retarder la putréfaction des aliments, et par extension à la transformation et à la conservation du vin rouge. Ce dernier ne se conservait effectivement pas longtemps à l’époque… et était le plus souvent reconverti en hypocras pour être servi à l’apéritif. On s’en servait également pour parfumer les mets tels que le pain d’épices.

 

Puis la plante…

La cardamome verte, ou Elettaria cardamomum, fait partie de la même famille que le gingembre et le curcuma : celle des zingibéracées. C’est une plante herbacée vivace à rhizome qui peut dépasser deux mètres de hauteur. Il en existe de deux sortes : la cardamome verte qui est l’objet de cet article, et la cardamome noire, ou cardamome du Népal (Amomum subulatum).

La cardamome verte est originaire du sud de l’Inde et du Sri Lanka, régions dans lesquelles elle a été domestiquée puis cultivée en terrasse en altitude moyenne (de 750 à 1500 mètres) en milieu humide. Elle aime se développer dans la chaleur, l’ombre et l’humidité. Des souches sauvages se trouvent encore dans les forêts tropicales du sud de l’Inde. La plante domestiquée a été exportée et s’est toutefois bien acclimatée en Amérique centrale et en Amérique du sud, en Tanzanie, au Vietnam et au Cambodge.

Elle produit des feuilles larges et longues (jusqu’à 75cm de longueur pour 5cm de largeur !). Les fleurs sont de petite taille et de couleur claire (blanches à rose pâle). Les fruits de 1cm de long ont trois compartiments renfermant une dizaine de graines noires. Pour information, le fruit de la cardamome noire est plus sombre, plus gros : environ 3 cm, et d’apparence plus fibreuse que sa « cousine ». Chaque gousse produit une trentaine de graines. Elle nous vient de l’est de l’Himalaya, mais se trouve également au sud de la Chine et en Afrique. La cardamome blanche est en fait de la cardamome verte blanchie au dioxyde de soufre. Il est préférable d’éviter d’en consommer.

 

… et ses vertus médicinales

En phytothérapie, on utilise les feuilles, les fruits et les graines de la cardamome verte pour faire des teintures mères, des infusions, des cataplasmes, et des décoctions. Les graines peuvent être réduites en poudre et consommées comme telles, seules ou dans une formule de plantes. L’huile essentielle est obtenue à partir des fruits et graines.

La cardamome verte est bon anti-inflammatoire et un excellent stimulant digestif (en augmentant Agni, le feu digestif). Mais elle est surtout connue pour lutter contre les troubles gastriques, comme les indigestions, les coliques, les gastrites, la diarrhée, la colopathie fonctionnelle, la maladie de Crohn et les spasmes digestifs. Elle apaise Vata du fait de ses vertus antispasmodiques et carminatives (élimine les gaz du colon). Elle aide à réguler la flore intestinale grâce à ses vertus antiseptiques, antimicrobiennes et antimycosiques. Elle est également efficace pour traiter les maladies des voies respiratoires, telles que le rhume, la bronchite, la dyspnée, la toux, les maux de gorge. C’est un tonique appréciable pour les conditions asthmatiques. La cardamome verte est aussi indiquée pour traiter les états dépressifs. Et pour finir, elle possède des vertus aphrodisiaques.

Il est important d’éviter d’en consommer en trop grande quantité (quand je parle de grande quantité je parle de plus de 5g par jour). Il est de toute manière préférable de consulter un spécialiste qui saura vous orienter, surtout si vous souffrez de conditions inflammatoires type ulcères, de problèmes cardiaques (myocardite) ou de troubles hépatiques. Les doses journalières recommandées sont de 1,5g de cardamome en poudre, 1 à 2 g de teinture (5 à 10 gouttes à raison de 3 prises), 2 gouttes d’huile essentielle (à privilégier en usage externe), de 0,5 à 1g de graines (ou la même quantité réduite en poudre) à laisser infuser dans 240ml d’eau chaude, pendant 10 minutes et à consommer après le repas. Les femmes enceintes et les enfants éviteront d’utiliser l’huile essentielle de cardamome, et la consommeront sous forme d’infusions.

 

La cardamome, c’est aussi une épice

Quand je dis le mot épice, qu’est ce qui vous vient le plus rapidement à l’esprit ? Un parfum ? Une saveur ? Une couleur ? Le monde des épices est d’une richesse au moins équivalente à la diversité du règne végétal. Il peut s’agir de graines (cumin, coriandre), de feuilles (laurier), de fruits (piments, poivre), de fleurs (safran), d’écorces (cannelle), de bulbes (ail), de rhizomes (gingembre, galanga)… Les épices sont d’une importance capitale dans la cuisine Ayurvédique.

La cardamome verte entre dans la composition des curry et masala en Inde, puis du Ras El Hanout dans les pays du Maghreb. Ces mélanges d’épices sont largement employés dans ces pays et font partie intégrante de leur tradition gastronomique. Ils relèvent la saveur des plats et des mets, tout en ajoutant les vertus médicinales de leurs composants combinés. Ainsi la préparation des aliments avec des épices fait de la cuisine la première des médecines.

Dans les pays arabes, il est de tradition de servir le café avec de la cardamome en guise d’hospitalité, pour le goût certes, mais aussi pour évacuer la toxicité de la caféine. Il en va de même pour le thé et la toxicité de la théine. Le goût (Rasa) de la cardamome se mêle à l’amertume du café tout en développant ses qualités d’antidote. En Inde, la cardamome est aussi mélangée au lait pour dissoudre les mucosités difficiles à digérer pour notre organisme.

La cardamome peut être utilisée dans les plats tant salés que sucrés. Sa saveur est douce (Madhura) et piquante (Katu) à la fois. Son effet sur le métabolisme est rafraîchissant. Son effet post-digestif est doux. En sanskrit, son nom est Sukshma, qui veut dire subtil. Elle aide à équilibrer les trois Doshas, en cela on dit qu’elle est tri-doshique et sattvique, c’est à dire qu’elle augmente les qualités sattviques tant dans l’organisme que dans la psyché (est sattvique ce qui est subtil et léger et possède des qualités équilibrées et équilibrantes). En fait, la cardamome n’aggrave qu’un Pitta déjà très élevé.

 

Donc, pensez à vos petites graines de cardamome verte pour accompagner votre café ou votre thé si vous en buvez! Vous pouvez aussi plonger une gousse de cardamome dans l’eau de cuisson de vos céréales (le riz dans le rice cooker, ou cuit à la vapeur dans un panier, par exemple), ce qui parfumera délicatement votre aliment et lui ajoutera des qualités équilibrantes, puisque sattviques.

 

 

 

*Le papyrus Ebers, du nom de son traducteur : Georg Moritz Ebers, est l’un des plus anciens écrits sur la médecine qui existe au monde (16e siècle avant JC, pendant le règne d’Amenhotep, ou 14e et 13e siècle avant Jésus christ, selon les historiens). Il mesure plus de 20 mètres de long sur 30cm de large et comprend 877 paragraphes dans lesquels sont détaillés plus de 700 formules et remèdes d’origine végétale, minérale et animale.

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