Respiration et Ayurvéda

Respirer la sérénité, le bonheur… Avoir le souffle court… Toutes ces expressions montrent à quel point respirer est une action vitale. En cela, la respiration est considérée comme l’un des 13 piliers (un article ici) par l’Ayurvéda. Nous le faisons si naturellement depuis notre naissance, que nous ne cherchons pas forcément à comprendre ce que cela implique pour nous, notre bien-être, notre équilibre et notre état de santé. Notre corps sait. Notre corps fait. Nous n’y pensons même pas. Cependant nous respirons entre 20.000 et 30.000 fois par jour selon notre degré d’exercice physique, ce qui est considérable.

 

Respirer est vital

Selon l’Ayurvéda, la respiration, y compris la respiration cellulaire (cycle de Krebs) est une action reliée, entre autres, à l’élément air (Vayu). Ce dernier est compris dans Vata Dosha qui gère le mouvement, l’énergie, le souffle, le système nerveux, les systèmes sensoriels, et la régularité des cycles. Rien que ça! Vata Dosha gouverne également les deux autres Doshas, Pitta et Kapha, dans le sens où Vata coordonne leurs actions. Par conséquent, Vata est responsable de l’ensemble des processus en oeuvre dans l’organisme et de leur coordination. Comme nous allons le voir, la respiration est également une succession de cycles et de mouvements. Mais cela va encore plus loin.

Les Doshas (pour plus de précisions sur les Doshas, un article ici) sont eux-mêmes divisés en sous-Doshas, ce qui permet d’affiner la compréhension des processus en oeuvre dans la vie et dans notre corps. Vata Dosha gère également l’accueil et le mouvement de Prana dans le corps. Cette énergie provient également du souffle. Et c’est en cela que respirer est aussi vital, puisque Prana est l’énergie vitale. Si vous voulez en savoir plus sur Prana, un article ici.

 

Les sous-doshas

Vata Dosha se présente sous cinq formes de Vayus (vents) : Prana, Udana, Vyana, Samana et Apana. Ces cinq formes ou expressions de Vata Dosha sont les sous-doshas de Vata.

Pitta Dosha et Kapha Dosha ont également chacun 5 sous-doshas.

Le premier sous-dosha de Vata Dosha est Prana Vayu. Le mot Prana nous vient du sanskrit, de la racine an qui signifie respirer ou stimuler. Cette énergie vitale se diffuse dans la tête à partir de la fontanelle (sommet du crâne, 7eme Chakra, ou Chakra coronal : Sahasrara Chakra), puis elle se déplace vers la poitrine par la gorge. Prana Vayu permet tous les mouvements vitaux dont l’inspiration de l’air sur le plan physique. Prana Vayu gouverne également les sens, le mouvement de l’esprit, de la conscience. En cela, ce Vayu détermine aussi notre inspiration sur un plan plus subtil, notre réceptivité, notre ouverture d’esprit. Son mouvement est centripète, c’est à dire qu’il amène de l’extérieur vers l’intérieur. Comme Prana Vayu gouverne notre réceptivité, il détermine également notre ouverture d’esprit et notre capacité à apprécier toutes sortes de nourritures, tant au niveau du corps, qu’au niveau de l’esprit, ainsi que la qualité de notre connexion à ce qui nous entoure. Toute maladie ou déséquilibre implique par conséquent une diminution de Prana et/ou de son mouvement dans notre corps. Le Pranayama est un ensemble de techniques de respiration qui aide à élever Prana, à équilibrer sa répartition, et à nous renforcer.

La voix, notre capacité à nous exprimer sont intrinsèquement liés à la respiration. Udana Vayu est le second sous-dosha de Vata. Udana nous vient de la racine ud qui signifie vers le haut. Il est aussi situé dans la poitrine, mais plus centré sur la gorge. Il régit l’expression et la parole, tout ce qui monte et qui s’élève. Son mouvement est ascendant. Il gère l’expiration en corrélation avec Apana Vayu (le 5eme Vayu qui gère l’élimination et l’évacuation que nous verrons après). Quand Udana Vayu est affaibli il provoque la toux, les renvois, les vomissements, le hoquet… Udana Vayu est responsable de la manière dont nous manifestons notre énergie dans la vie, à travers notre capacité à nous exprimer à l’aide de sons et de mots. Par extension, ce mouvement ascendant détermine notre aspiration à la vie. Le Yoga, les Arts Martiaux tendent à entretenir et à enrichir Prana mais également à développer Udana, à travers le travail du souffle, et la prise de conscience de son mouvement. Le Pranayama est la discipline du souffle. En cela, il traduit la notion d’effort et de rigueur nécessaires à ce travail de pétrissage.

Les autres Vayu sont également impliqués dans le mouvement de l’air que nous respirons, ainsi que du Prana :

L’air qui s’équilibre ou Samana Vayu est le 3eme sous-dosha de Vata. Du sanskrit Sama, équilibrer, Samana Vayu par son travail d’équilibrage facilite l’absorption de l’air dans les poumons, et de Prana. Veillant à l’assimilation, il contribue par conséquent à l’augmentation de l’énergie vitale dans notre corps. Vyana Vayu, ou l’air diffusé, nous vient de Vi qui signifie à part ou séparer. Vyana Vayu est le Vayu ou le mouvement qui gouverne la circulation d’une manière générale dans tout le corps. La respiration et la circulation sanguine sont intrinsèquement liés. Aussi n’est il pas surprenant de constater que c’est le sang qui transporte l’oxygène dans tout l’organisme… Le dernier sous-dosha de Vata est Apana ou air descendant. La racine de ce mot est Apa, qui signifie l’air qui s’en va. Apana Vayu régit l’élimination de tout ce qui ne sert pas à alimenter notre corps et qui doit être évacué. Dans le cas de la respiration, il s’agit de l’expiration de l’air vicié en corrélation avec Udana Vayu.

La respiration consiste en un mouvement perpétuel qui nourrit notre être sur tous les plans (physiques, subtils). Vous comprenez mieux maintenant la nécessité de respirer et d’apprendre à le faire en conscience. 

Il nous manque un dernier sous-dosha à explorer pour comprendre la respiration. Ce qui peut paraître surprenant, c’est qu’il appartient à la famille de Kapha. Pour être transformé, distribué dans le corps physique, puis rejeté, l’air a besoin d’être accueilli dans une structure spécifique, sinon aucune manifestation, du moins telle que nous la connaissons, ne serait possible. Il a été dit précédemment que Vata Dosha gouvernait Pitta Dosha et Kapha Dosha. C’est un fait. Seulement, sans Kapha Dosha, Vata Dosha serait éparpillé aux quatre vents et Pitta Dosha brûlerait tout sur son passage. Kapha Dosha assure le soutien et la lubrification de notre corps. Il apporte la structure qui rend les fonctions des Doshas Vata et Pitta manifestes, ce qui nous permet d’exister et de vivre. Kapha Dosha produit le flegme dans l’estomac, maison mère de Kapha, qui est ensuite redistribué dans les poumons, également gérés par Kapha Dosha. Ils supportent donc mal la sécheresse et sont très sensibles aux variations de température. Comme ils sont en contact constant avec l’air, la lubrification des poumons est essentielle, et cette lubrification est assurée par le sous-dosha Avalambaka Kapha. La santé et la puissance de nos poumons montrent notre capacité de résistance face à la maladie. De même, si les émotions de type tristesse due à l’attachement (l’attachement résulte d’un excès de Kapha) ou chagrin sont réprimées, elles sont retenues à l’intérieur et s’accumulent dans les poumons. Un état d’accumulation aggravé se traduit par du flegme en excès, de la toux, de la congestion et des difficultés respiratoires.

 

Le Pranayama, ou la discipline du souffle

Il existe nombre de techniques de respirations : Ujjayi, Kapalabhati, Bastrika, Viloma Pranayama, Anuloma, Samavritti… Elles sont employées dans la pratique du Yoga et du Pranayama.

Le Pranayama amène nombre de changements et d’évolutions sur différents plans, notamment au niveau de la conscience, ainsi qu’au niveau subtil. Il est important d’être accompagné et guidé par un enseignant agréé en qui vous pouvez avoir confiance, car ces techniques doivent être apprises de manière mesurée et progressive pour que ces changements s’installent dans la bienveillance, de manière à préserver ou/et à restaurer votre équilibre.

Dans cet article, je vous présente deux techniques :

 

Prendre conscience de sa respiration

  • Pour une première prise de contact avec le souffle, simplement allongez vous confortablement. Fermez les yeux. Prenez le temps de bien vous détendre.
  • Dans un premier temps, vous allez inspirer et expirer par le nez, sans effort particulier.
  • Pendant que vous inspirez, vous allez simplement porter votre attention sur la qualité de l’air qui passe par vos narines. L’air que vous inspirez est il froid ou chaud?
  • Puis pendant que vous expirez, portez à nouveau votre attention sur la qualité de l’air qui passe par vos narines. L’air est il plus chaud qu’à l’inspiration?

Respirez juste normalement de manière à ne porter votre attention que sur l’entrée et la sortie de l’air par vos narines. Observez ces modifications apportées à l’air et à ses qualités, sur votre corps, sur votre esprit. Faites quelques inspirations et expirations pour éveiller votre conscience à ces sensations.

 

La respiration alternée

Peut être que vous ne le savez pas, mais quand vous êtes en parfaite santé, vous respirez un débit d’air plus important par la narine droite pendant pratiquement 2 heures, puis par la narine gauche dans le même temps, et ainsi de suite… Chez la plupart d’entre nous, la régularité de ce rythme est perturbée, ce qui provoque des déséquilibres, et un terrain favorable pour des pathologies. Cette technique dite de respiration alternée permet de rétablir un rythme régulier.

Il est ici question de réguler et d’équilibrer la répartition du Prana, l’énergie vitale, dans tout le corps.

Voici comment procéder :

  • Asseyez vous confortablement, le dos bien droit, sur une chaise, ou en tailleur au sol, dans un endroit tranquille où vous ne serez pas dérangés.
  • Fermez les yeux et placez votre index et votre majeur sur votre 6eme Chakra (Ajna, ou 3eme oeil), main droite de préférence. La paume de votre main dirigée vers votre visage. Laissez reposer vos autres doigts légèrement repliés sur votre visage de part et d’autre de votre nez.
  • Bouchez votre narine droite avec votre pouce, inspirez par la narine gauche. Commencez avec 4 temps (comptez 4 dans votre tête le temps d’inspirer).
  • Bouchez vos deux narines (la droite avec le pouce, la gauche avec l’annulaire) et faites une rétention à plein. Pareil en 4 temps.
  • Débouchez la narine droite, laissez la narine gauche bouchée, et expirez par la narine droite, en 4 temps.
  • Bouchez vos deux narines et restez à vide (sans inspirer), en 4 temps.
  • Débouchez votre narine droite, laissez la narine gauche bouchée, et inspirez par la narine droite en 4 temps.
  • Bouchez vos deux narines et faites une rétention à plein, en 4 temps.
  • Débouchez votre narine gauche, laissez la narine droite bouchée, et expirez par la narine gauche en 4 temps.
  • Restez à vide (sans inspirer) pendant 4 temps.

Vous venez de faire un cycle complet. En observant le mouvement dans sa globalité, c’est un peu comme si vous aviez dessiné un 8 ou un ruban de Moebius, symbole de l’infini.

Soit vous reprenez une respiration normale en gardant les yeux fermés et vous observez vos sensations.

Soit vous reprenez un cycle. L’idéal est de commencer avec 3 cycles successifs.

Si vous sentez que vous avez le souffle court à la reprise des cycles normaux de respiration, ou que vous forcez pendant les cycles, abaissez votre compte à 2 temps pour commencer. Il ne sert à rien de forcer, si ce n’est pour créer du stress, ou risquer de déséquilibrer Vata Dosha. Donc allez y doucement, vous en ressentirez davantage les bienfaits.

Cette respiration alternée permet également d’équilibrer le féminin et le masculin en terme énergétique. Vous pouvez très bien visualiser la lune (principe féminin) quand vous inspirez et expirez de la narine gauche, puis le soleil (principe masculin) quand vous inspirez et expirez de la narine droite. D’ailleurs, quand vous commencez votre cycle par la narine gauche, vous faites un Pranayama lunaire qui est apaisant. Si vous commencez par la narine droite, il s’agit d’un Pranayama solaire qui est stimulant. Adaptez votre technique en fonction des effets que vous recherchez. Essayez, vous verrez 😉 ! 

Le petit plus : Le fait de respirer en 4 temps à chaque étape permet de travailler l’ancrage et la stabilité. Le chiffre 4 se retrouve dans la figure géométrique du carré qui est en relation avec l’élément terre. Il représente la base. Le 1er Chakra, Muladhara, ou Chakra racine, qui nous relie à la terre et au monde physique (4 points cardinaux, 4 saisons…), est d’ailleurs représenté à l’aide d’un carré entouré de 4 feuilles de lotus. 

Pour finir : surtout prenez bien le temps de vous écouter et de respirer 🙂 ! Have fun !

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